mardi, octobre 27, 2009

Ostracisme de masse : au tour de la génétique?

Pasca Riché vient de publier dans Rue 89 un très intéressant papier sur l'utilisation de la génétique à droite avec des propos de Hortefeux à propos de l'affaire Sarkozy proprement stupéfiants. Il souligne combien cet appel à la génétique est récurrent à droite (il cite plusieurs propos tout aussi étonnants de Nicolas Sarkozy) et attribue tout cela à l'influence de la nouvelle droite.

Hypothèse plausible. qui fait penser que ces propos s'inscrivent dans une vieille tradition de l'ostracisme de masse qui prend des visages différents selon les périodes mais ne disparait jamais complètement. Cette histoire est certainement très complexe, mais j'imagine que l'on pourrait la réduire a gros traits en ces quelques étapes :
- dans l'antiquité grecque, le climat fabriquait des barbares que l'on pouvait réduire en esclavage avec la meilleure conscience du monde (brutes lorsque nés dans des pays trop froids, mollassons lorsque nés dans des pays trop chauds il leur manquait la faculté délibératrice qui distinguait les grecs)) ;
- plus tard, le sang a permis à l'aristocratie de justifier ses privilèges et sa domination sur un peuple qui manquait justement de ce sang : "bon sang ne saurait mentir" ;
- au XVIIIème siècle, quand les peuples commencent à s'émanciper émerge la notion de race et, avec elle, le racisme qui autorise, au nom de la supériorité de la race blanche, massacres de masse et esclavage ;
- le nazisme a porte un coup mortel au racisme (ce qui ne veut pas dire qu'il ne subsiste pas, mais plus personne n'ose en faire une théorie positive). Le voilà donc remplacé par cette "théorie" des gênes qui permet tout à la fois de justifier les positions acquises (je l'ai dans les gênes), la transmission à ses enfants (ils ont les mêmes gênes) mais aussi de sélectionner au plus tôt (dès le plus jeune âge, à quand des analyses génétiques à la naissance) les individus susceptibles de devenir dangereux et de les traiter (emprisonner, castrer…) avant qu'ils ne passent à l'acte.

On remarquera que dans tous les cas (sauf peut-être dans celui de l'aristocratie) la science est convoquée pour justifier ce qui n'est qu'idéologie.

3 commentaires:

Anonyme a dit…

Les références au qi et aux gènes sont très fréquentes dans la littérature économique anglo-saxone la plus mainstream. J'avoue être friand de raisonnements économiques mais quand je tombe sur ce genre d'articles (cf.Mankiw, etc.) un frisson me parcourt le dos...

Anonyme a dit…

Quelques exemples si cela vous intéresse:

http://gregmankiw.blogspot.com/2009/08/least-surprising-correlation-of-all.html

http://gregmankiw.blogspot.com/2006/07/nature-vs-nurture.html

Unknown a dit…

Je partage complètement ce sentiment d'épuisement devant certains textes, comme ceux que vous citez, mais aussi comme celui-ci d'une eau voisine à propos des inégalités d'A.Kling (voir le point 4) :

I think that perhaps the most important trend of the past thirty years is the increased importance of cognitive skills relative to physical labor. Obviously, this has been going on for more than just the past thirty years, but during the past thirty years we saw an acceleration. This has had a number of consequences:

1. It changed the role of women. Their comparative advantage went from housework to market work.

2. This in turn, as Wolfers and Stevenson have pointed out, changed the nature of marriage. Men and women look for complementarity in consumption rather than in production.

3. This in turn leads to more assortive mating, with achievement-oriented men looking for interesting mates rather than for good maids.

4. This in turn leads to greater inequality across households. It also fosters greater inequality among children. The children of two affluent parents are likely to have much better genetic and environmental endowments than the children of two (likely unmarried) low-income parents.

5. Inequality is exacerbated by globalization and technological change. If your comparative advantage is basic physical labor, you have to compete with machines as well is with workers from the Third World."

The net result is an economy that has improved considerably for people with high cognitive skills, but which has improved only somewhat for people with relatively low cognitive skills.